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"Les points sur les i", petit blog péda(nt)gogique lié à mon métier de prof de français. En 2021, j'attaque ma 22ème rentrée : la huitième dans la Manche, après neuf ans dans les Ardennes et plusieurs années en lycée et collège aux alentours de Dieppe. Cette interface est un lieu pour proposer des éléments (plus ou moins) en rapport avec les cours que j'inflige à mes élèves : cahiers de textes, documents complémentaires, billets d'humeur et partages de mes lectures personnelles... Bonne visite !

Opéra !

Petit clin d'oeil à mes cinquièmes avec lesquels je bosse sur le théâtre. Nous avons évoqué l'Opéra-Garnier de Paris récemment. J'étais de passage dans la capitale hier et j'ai décidé de descendre au métro Opéra pour finir à pied jusqu'à la gare Saint-Lazare.


L'Opéra est un joyau qui a pour écrin le Paris réaménagé par le baron Haussmann sous le règne de Napoléon III.

A noter qu'n beau roman de Tatiana de Rosnay raconte le destin émouvant de Rose qui ne veut pas quitter son logement alors que celui-ci est promis à la démolition sous les coups de pioche de l'haussmannisation - le titre est sobrement Rose.

Magnifique théâtre que l'Opéra où le spectacle est autant sur scène que dans la salle.

En 1876, quelques années après l'inauguration de Garnier (1868, de mémoire ?), le Théâtre des Arts de Rouen brûle. Catastrophe qui émeut jusqu'en Europe, et même en Amérique, car l'incendie fait de nombreuses victimes, ce qui était alors très rare. C'est sur cette époque que j'ai réalisé mon mémoire de Maîtrise il y a déjà bien longtemps, sous la direction de l'inégalable Florence Naugrette, à la Fac de Rouen. J'ai adoré cette année d'étude, passée à exhumer des photos, des articles, des documents inédits, à la Bibliothèque Municipale de Rouen, aux Archives municipales, aux Archives départementales. Parfois, je me dis que j'aurais dû persévérer dans un DEA que j'avais vaguement commencé sous la direction du génial Jean Maurice (mesure et démesure dans l'oeuvre de Chrétien de Troyes, tout un programme)

En 1876, donc, le théâtre brûle. Au-delà du drame humain, c'est une catastrophe pour la Ville de Rouen, réputée comme étant l'une des plus grandes villes théâtrales d'Europe. "Aller à Rouen" était une expression bien connue du milieu artistique : elle signifiait que, tant qu'on n'avait pas convaincu le public rouennais, on n'était pas encore pleinement reconnu comme un véritable acteur. C'était probablement une réputation surfaite mais le fait est que les "essais" (un acteur nouvellement engagé avait trois soirs pour convaincre le public qu'il était digne d'intégrer la troupe du théâtre de Rouen et le public y était impitoyable) sur la scène normande étaient généralement l'ultime étape avant d'intégrer ensuite une grande troupe parisienne, véritable consécration.

Pendant 7 ans, jusqu'en 1883, Rouen est orpheline de sa grande salle et plusieurs autres théâtres vont tenter, sans l'égaler, de la remplacer même si, coup de maître, le directeur du Théâtre-Français de la place du Vieux-Marché parvient à faire venir la star mondiale qu'est Sarah Bernhardt.

En 1883, une magnifique salle de spectacles est inaugurée, petite soeur jumelle de l'Opéra-Garnier. C'était une exigence de la Ville de Rouen qui a mis le paquet financier pour s'offrir une salle monumentale, gouffre financier mal estimé dont la construction a été émaillée de nombreuses saisies judiciaires. Comme à Paris, cette salle prend place dans un tissu urbain complètement modernisé avec une haussmannisation rouennaise qui reconstruit le centre-ville de Rouen mais oublie les quartiers de l'Est, comme l'actuelle place Saint-Marc, qui restera une zone misérable bâtie sur des marécages car les élus privilégieront l'édification du théâtre, bien plus importante à leurs yeux. Le jour de l'inauguration est particulièrement fastueux, avec la venue de plusieurs ministres. Il faut dire aussi qu'on inaugure en même temps, sur les boulevards, le premier lycée pour filles de France, actuellement collège Barbey d'Aurévilly et qui fut un temps le lycée Jeanne-d'Arc dans les couloirs duquel les parents de votre serviteur ont eu la bonne idée de se rencontrer un jour pour me permettre d'écrire ces lignes ;-)

Le Théâtre des Arts, reconstruit, retrouve son rang de salle européenne. Des oeuvres de Wagner y sont même créées. Court destin, malgré tout. Le Théâtre finit dans les cendres de l'incendie que les Allemands ont allumé en 1940 (et dont Hitler a paraît-il personnellement ordonné l'extinction pour préserver in extremis la cathédrale) et, puis, en 1944, il succombe définitivement sous les bombes de la Semaine Rouge lancées sans discontinuer par les Alliés en mai pour préparer le Débarquement...

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